BPF-Stockage

Fiche 2-3 - Stockage des denrées

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Au cours de leur stockage, les denrées peuvent être exposées à des contaminations bactériennes (conditionnement altéré, contamination croisée), chimique (fluide frigorifique, produits d’entretien) voire physique (éclats de verre cassé) ou voir s'y multiplier des souches microbiennes déjà existantes (mauvaise maîtrise des températures, dépassement de DLC).

Quelles denrées stocker ?

Les denrées concernées sont :

  • les matières premières, c'est-à-dire toutes les marchandises ou préparations culinaires emballées et/ou conditionnées,
  • les conditionnements destinés au contact alimentaire (barquettes, film, vaisselle plastique, etc.),
  • les produits semi-finis, c'est-à-dire les matières premières déjà manipulées mais destinées à être retravaillées avant d'être servies (NB : la fabrication et la gestion des PCEA[1] sortent du champ de ce guide et imposent une analyse de dangers spécifique),
  • les produits finis fabriqués dans l'établissement,
  • les repas fournis dans le cadre d’un protocole mis en place pour une allergie alimentaire.

Comment organiser les stocks ?

Séparer les denrées par catégorie

Dans la mesure du possible, l’entreposage en sécurité implique des stockages différenciés pour les fruits et légumes bruts voire terreux, les produits finis et les produits dangereux. Il implique également la maîtrise des opérations de nettoyage et désinfection, celle des nuisibles et la protection des denrées dans des conditionnements aussi hermétiques que possible (conditionnement d’origine pour les matières premières pré-emballées).

N.B. : La conservation de denrées appartenant au personnel n’est pas recommandée. Le cas échéant, ces produits doivent être identifiés, conditionnés, isolés ou être stockés dans un endroit spécifique identifié comme tel (réfrigérateur du personnel par exemple) et ne pas constituer une source possible de contamination pour les autres denrées.

A défaut de locaux séparés, un rangement strict est nécessaire

Un local ou une enceinte unique de stockage peuvent être acceptés si une sectorisation stricte sépare et protège les différentes catégories de denrées.

Une armoire froide (froid positif) unique peut être tolérée à condition que :

  • les emballages (cartons) soient ôtés,
  • les denrées sensibles (produits cuits ou préparations culinaires) soient protégées, filmées ou conditionnées,
  • les différentes denrées soient stockées par zones (étagères), sans contact direct entre elles : fruits et légumes, viande crue, produits cuits ou préparations culinaires, etc.
  • l’armoire froide soit réglée sur la température de conservation de la denrée la plus sensible.

Les mêmes règles de protection contre les contaminations devront être respectées pour le stockage des conditionnements destinés au contact alimentaire : entreposage dans des contenants fermés, à l’abri de la poussière dans une armoire ou un local propre.

Laisser l'air circuler

Dans les armoires et chambres froides mais aussi dans les enceintes chaudes et les étuves, le maintien d'une température uniforme dans l'ensemble du volume est assurée par la circulation d'air froid ou chaud. Le même processus a lieu dans la caisse d'un engin frigorifique :

Il est donc important de stocker les denrées sur des étagères ou clayettes, sans trop les encombrer. Le stockage à même le sol est à proscrire au profit de caillebotis adaptés. De même, l’empilage des cartons des surgelés doit aussi être évité. Dans l'idéal, les étagères de stockage sont maintenues à quelques centimètres des parois de la chambre ou de l'armoire.

En cas d'incident ?

Les produits dont le conditionnement a été altéré au cours du stockage (film plastique déchiré, conserve bosselée) doivent être mis en consommation très rapidement voire détruits selon la nature de la détérioration.

Dans l’attente de cette orientation, ils doivent faire l’objet d’une protection appropriée (ex : film alimentaire).

Combien de temps stocker ?

Les durées de conservation sont définies par le fabricant et mentionnées sur l’étiquetage des denrées préemballées. Toute matière première en stock doit être identifiée par son étiquetage d’origine. Cet étiquetage doit être conservé pendant toute la durée du stockage.

Les durées de conservation sont exprimées par :

  • une date limite de consommation (DLC) : « à consommer jusqu’au… » ;

    une DLC ne peut en aucun cas être dépassée ; un produit à DLC dépassée est considéré comme dangereux pour la santé humaine et ne pourra pas être consommé ; s'il est détenu au sein de l’établissement, il doit être identifié comme sous-produit animal (SPAN) voire comme déchet (ordures ménagères) ;

  • une date de durabilité minimale ou DDM : « à consommer de préférence avant le… », « à consommer de préférence avant fin… ».

    Le dépassement d’une DDM n’entraîne pas de risque pour le consommateur, à condition que le produit et son conditionnement ne soient pas altérés. La DDM correspond à une garantie du fabricant portant sur les caractères organoleptiques du produit (aspect, texture, saveur, etc.). Il est donc tout à fait possible de mettre en œuvre des denrées dont la DDM est dépassée, mais ces denrées peuvent ne pas présenter des caractéristiques optimales au plan culinaire.

    N.B. : lorsque des produits à DDM dépassée en conditionnement unitaire (type biscuits) sont présentés au consommateur, il est en général préférable d'en informer la clientèle. Les convives ne font en effet généralement pas de différence entre DLC et DDM.

Différentes options permettent de faciliter la gestion des stocks, surtout lorsqu'ils sont importants :

  • mise en place d’un système de rangement « PEPS » (premier expiré, premier sorti),
  • système complémentaire d’identification, comme l'affichage en gros caractères de la DLC,
  • réalisation d’inventaires réguliers.

À quelle température stocker ?

Les températures de conservation des produits sont définies par le fabricant et mentionnées sur l’étiquetage.

Les températures d’ambiance maximales des enceintes frigorifiques doivent être adaptées au produit dont la température de conservation est la plus basse, dans le cas d'un stockage multi-produits dans une même enceinte.

Stockage à température ambiante

Les produits d'épicerie peuvent être stockés à température ambiante mais à l’abri de la lumière et de l’humidité. Les conserves sont conçues pour rester étanches seulement jusqu’à la température de + 55°C.

Parmi les produits appertisés, il est nécessaire de distinguer les conserves, qui ont été stérilisées et les semi-conserves, seulement pasteurisées. Ces dernières (anchois, foie gras, …) doivent être conservées au froid.

Stockage en froid positif

De nombreux produits frais doivent être conservés au froid positif. Selon leur sensibilité, la température réglementaire de stockage peut s'échelonner de +4°C à +2°C (poisson, frais).

La réfrigération des fruits et légumes bruts ne constitue pas une obligation mais elle favorise leur conservation, sous réserve de ne pas recourir à des températures trop basses. Un entreposage en chambre froide à une température de l’ordre de +8°C est recommandé.

La fiche 2.6 relative à la décongélation souligne que les produits en cours de décongélation doivent être placés dans une enceinte en froid positif.

Inversement, la chambre froide positive peut accueillir des denrées plus chaudes telles que des préparations en fin de refroidissement ou manipulées à température ambiante. Il convient d'adapter la quantité des denrées ainsi introduites pour éviter une élévation de la température au sein de la chambre ou de l'armoire. La conservation au froid des excédents est présentée dans la fiche 2.15 Gestion des « excédents ».

NB : les cuisines qui élaborent intentionnellement à l’avance un ou des plats (PCEA[1]) dont la consommation sera différée dans le temps doivent réaliser une analyse des dangers spécifique pour ce type de production en complément de l’application de l’intégralité de ce guide.

Le stockage en froid positif concerne également la présentation à la vente des denrées pré-emballées réfrigérées (yaourts, portions individuelles de fromages, …). La température de ces produits doit être conforme tout au long de leur exposition à la vente aux prescriptions mentionnées par le fabricant sur l'étiquetage.

Pour tenir compte des variations de température (ouvertures fermetures de portes, dégivrages), il peut être utile de fixer une température d’ambiance de l'enceinte inférieure de 1°C à 2°C à la température réglementaire du produit le plus sensible, soit +1°C si l'enceinte contient du poisson frais.

Stockage en froid négatif

La température classique de conservation est de -18°C, même si certaines denrées congelées ou surgelées pourraient être conservées à des températures plus élevées.

La chambre froide négative a également vocation à accueillir des matières premières excédentaires mises en congélation (voir fiche 4.8).

Stockage au chaud (> +63°C)

Dans l'attente du service, les plats chauds doivent être maintenus à une température supérieure ou égale à +63°C en tout point.

Une exception est toutefois possible pour les viandes consommées saignantes ou rosées à cœur et servies rapidement après cuisson.

Surveiller les conditions de stockage

Chaque enceinte est identifiée sans ambiguïté (type et emplacement, numéro). Cet identifiant figurera sur l’enceinte froide et sur tous les documents associés à cette enceinte (fiches d’enregistrement des températures, disques de thermographes ou logiciel de suivi informatisé).

Chaque enceinte est équipée, au minimum, d’un moyen de mesure de la température à lecture directe dont la justesse est régulièrement vérifiée. La sonde de ce moyen de mesure est placée au point le plus chaud de l’enceinte réfrigérée.

Un thermomètre relevant les valeurs minimales et maximales atteintes dans la chambre froide permet d'avoir une idée du fonctionnement durant une période d'absence du personnel (week-end, congés). Un système d’enregistrement de la température en continu est utile pour connaître la durée d'un éventuel incident et d'avoir accès aux couples temps/température afin d'en apprécier les conséquences. Pour le stockage de denrées surgelées, un tel enregistrement est obligatoire.

N.B. : lorsqu’un système d’alarme est en place, les seuils de déclenchement des alarmes et leur éventuelle temporisation doivent être clairement définis. Ces seuils doivent être compatibles avec le fonctionnement normal de la cuisine (pas de déclenchement intempestif à chaque ouverture de porte). Des systèmes de report d’alarme sont à prévoir pour la détection des non-conformités en dehors des périodes de fonctionnement de l’établissement. Des tests d’alarmes sont à réaliser régulièrement. Les résultats de ces tests sont à enregistrer.

La surveillance consiste à s’assurer quotidiennement du bon fonctionnement de la chambre froide, en réalisant un relevé de la température dans l’enceinte. Il s’agit de lire la valeur de la température indiquée par le dispositif de mesure et de comparer la valeur mesurée à la valeur cible fixée pour la chambre froide considérée. Les contrôles sont à effectuer lorsque la température d’enceinte est stabilisée, c’est-à-dire en dehors des périodes de stockage des achats ou de production. En effet, les ouvertures et fermetures répétées de portes modifient la température de l'air dans la chambre froide. Privilégier la réalisation de deux relevés des températures : le matin à la prise de service et le soir (ou l’après-midi) juste avant la fermeture de l’établissement.

Les éventuelles non-conformités font l’objet d’un enregistrement sur un document spécifique dont un modèle est proposé en annexe 5.5 Suivi des températures de stockage. Il est recommandé de prévoir une fiche de ce type par chambre froide, qui sera fixée sur la porte.

Réagir à une valeur non-conforme

Si une mesure de température aboutit à une valeur non-conforme, deux actions doivent être engagées : une analyse des causes et une étude de la dangerosité éventuelle des produits concernés.

Si la surveillance de l'ambiance de stockage fait apparaître un incident passé (coupure de courant momentanée au cours de la nuit ou du week-end), une vigilance particulière doit être accordée aux produits stockés, même si leur température à cœur apparaît conforme au moment de la mesure (reprise du service).

Analyse des causes et mesures correctives

Face au constat d'une température non conforme, une analyse des causes doit être conduite. Celle-ci doit permettre de déterminer :

  • l'ampleur réelle de l'incident, sa durée, les quantités de denrées concernées, …
  • les mesures correctives adaptées à mettre en œuvre pour éviter qu'un tel incident se répète.

L'analyse des causes et la mesure corrective sont synthétisées sur la fiche de relevé des températures.

Action sur les denrées concernées

Le dysfonctionnement d'une chambre froide peut avoir des conséquences variables sur les produits stockés.

La durée de l'incident, la température initiale de stockage, la capacité thermique des produits, leur sensibilité microbiologique, … sont autant de paramètres à prendre en compte pour décider du devenir des denrées concernées parmi les 3 options possibles :

  1. les utiliser selon les modalités envisagées initialement,

  2. les jeter ou

  3. les utiliser moyennant des précautions particulières (mise en œuvre rapide, cuisson, …).

Le graphe ci-avant illustre les différents cas possibles. La durée de l'incident et la température réellement atteinte par les denrées peuvent être difficiles à apprécier en l'absence d'un enregistrement en continu de la température de stockage. Il convient de majorer ces deux valeurs :

  • le point de départ à retenir pour l'incident est le moment du dernier enregistrement d'une température conforme ;
  • la température maximale (pour un produit réfrigéré) ou minimale (pour un produit maintenu au chaud) est celle mesurée par le thermomètre mini/maxi présent dans l'enceinte.

La durée au-delà de laquelle les denrées doivent être jetées ne peut pas être définie a priori ; elle est liée aux causes de l'incident : en cas de coupure ponctuelle d'électricité, la chambre froide garantit le maintien de la température pendant quelques heures, sous réserve de ne pas ouvrir les portes. Mais, si l'incident est lié à un joint défectueux, sa durée est beaucoup plus longue, et il est préférable de jeter toutes les denrées mal réfrigérées.

De même, ce type d'incident doit rester exceptionnel : quelques fois par an représente une fréquence tolérable. Mais la répétition de ce type d'incident chaque semaine est inacceptable : la chambre froide et/ou les procédures de stockage doivent impérativement être revues.

RemarqueARCHIVES

(A conserver pendant 3 ans)

ComplémentPour aller plus loin …

  • Reg CE 852/2004 relatif à l'hygiène des denrées alimentaires, annexe II, chapitre IX
  • Reg CE 37/2005 relatif au contrôle des températures dans les moyens de transport et les locaux d'entreposage et de stockage des aliments surgelés destinés à l'alimentation humaine, article 2
  • Décret n° 55-241 du 10 février 1955 pris pour l'application en ce qui concerne le commerce des conserves et semi-conserves alimentaires de la loi du 1er août 1905 modifiée et complétée sur la répression des fraudes
  • Code de la consommation, article R. 412-10
  • Arrêté du 21 décembre 2009 relatif aux règles sanitaires applicables aux activités de commerce de détail, d’entreposage et de transport de produits d’origine animale et denrées alimentaires en contenant, annexe 1
  • Arrêté du 8 octobre 2013 relatif aux règles sanitaires applicables aux activités de commerce de détail, d'entreposage et de transport de produits et denrées alimentaires autres que les produits d'origine animale et les denrées alimentaires en contenant